Editos INFOS CP

infos CP : février 2019

Pour le mot d’ordre de ses vœux 2019, la Fédération protestante de France a choisi le verset d’Esaïe 30,15 : « C’est dans le calme et la confiance que sera votre force ». Ce choix n’est bien sûr pas fortuit, dans le contexte d’incertitude, d’inquiétude et de tensions qui marque notre pays d’une manière inédite. Certes, c’est sans doute la tradition frondeuse des français, épris de liberté, jamais avares d’une révolution, qui s’exprime à travers le mouvement des gilets jaunes. Mais les convulsions périodiques qui traversent notre pays sont aussi l’expression d’une incapacité française à dialoguer, à rechercher le bien commun à travers des compromis acceptables. On a assez souligné à ce sujet la faiblesse des syndicats français qui illustre de manière plus générale celle des corps intermédiaires. Les pays de tradition protestante sont à cet égard davantage habitués au dialogue et au compromis, loin de la pensée unique et de l’affrontement bloc contre bloc.

Nous ne pouvons alors qu’encourager les membres de nos paroisses et œuvres à prendre part au grand débat national, comme l’a fait à travers une recommandation récente l’Assemblée générale de la Fédération protestante de France. Malgré les ambiguïtés et les limites de l’exercice, la possibilité de se rencontrer, de s’exprimer, de dialoguer sur des sujets décisifs est une chance qui peut contribuer à donner plus de maturité à notre démocratie. C’est dans ce contexte que se préparent les élections européennes, qui seront un moment de vérité sur ce que nous attendons et espérons pour l’avenir de l’Europe. Du côté des Églises, nous avons choisi de travailler avec nos Églises sœurs de Bade et du Palatinat pour la préparation de cette importante échéance électorale. Plutôt qu’une déclaration des directions d’Église, nous proposerons une démarche de réflexion dont pourront se saisir paroisses et œuvres, avec la possibilité d’inclure celle-ci dans les célébrations du temps du Carême. C’est ainsi que 6 thèmes essentiels pour l’avenir de l’Europe pourront accompagner les 6 semaines du Carême : la paix, la justice sociale, la justice climatique, les droits humains, la diversité culturelle, l’État de droit et la démocratie participative. Les textes en allemand et en français seront disponibles courant février.

Dans le même esprit d’encouragement à la réflexion et à la prise de recul, la CASPE poursuit jusqu’en avril son cycle « Religion et politique » . De son côté, le Consistoire supérieur de l’EPCAAL consacrera sa rencontre du 13 avril au thème « Église et engagement citoyen ». J’invite aussi dans ce contexte à la Journée Mondiale de Prière (JMP) organisée cette année par les femmes de Slovénie, qui aura lieu le vendredi 1er mars 2019 sur le thème « Venez, car tout est prêt ». Dans ces temps d’incertitude, le devoir des chrétiens est en effet de témoigner que la confiance est possible, que l’avenir reste ouvert parce que Dieu nous accueille tous à sa table, tels que nous sommes, en fils et filles bien-aimés. Et « c’est dans le calme et la confiance que sera votre force »…

Christian Albecker, président de l’UEPAL
 

infos CP janvier 2019

Poursuis la paix !

« Recherche la paix et poursuis-là ! » nous interpelle ce verset du psaume 34 choisi comme mot d’ordre pour l’année 2019. À l’aube de cette nouvelle année, la question de la paix se trouve ainsi placée au cœur de notre méditation biblique, des perspectives de nos engagements et de nos résolutions personnelles. Que l’on puisse désirer la paix, qu’elle soit l’objet de notre quête la plus intérieure, nous le concevons aisément. Qu’il faille la poursuivre, voire la pourchasser questionne.
À Strasbourg, durant la période de l’Avent, nous venons d’expérimenter combien la paix est fragile. Par la folie meurtrière d’un seul individu, tout un pays, a basculé d’un instant à l’autre dans l’horreur de la terreur et de la haine, de la méfiance et de la suspicion. D’un moment à l’autre, malgré l’ambiance festive, notre paix intérieure a été déstabilisée, notre sérénité désarçonnée et notre paix relationnelle ébranlée, affectant ainsi notre capacité à vivre en harmonie dans une même cité avec nos altérités culturelles, religieuses, convictionnelles.
C’est aussi dire que notre paix intérieure et relationnelle est principalement menacée par nous-même, les humains. Non d’abord par des étrangers, ces autres qui viendraient nous déranger dans notre confort, mais par notre incapacité à faire le bien que nous voudrions pourtant faire et de rendre notre monde de justice. Le grand rassemblement œcuménique de Bâle en 1989 sur la thématique « paix, justice, sauvegarde de la création » avait vu juste. « Il n’y a pas de paix sans justice, et pas de justice sans sauvegarde de la création » ? Ce propos est plus actuel que jamais.
Quand le psalmiste invite à poursuivre la paix, il nous donne à comprendre que la paix nécessite une attention suivie et qu’elle exige un permanent effort de réconciliation. Nous aurions tort de croire que la paix puisse être de l’ordre d’un acquis. Les perspectives des élections pour le renouvellement du Parlement européen et les inquiétudes qu’elles suscitent, l’illustrent amplement. En effet, nombreux sont ceux qui aujourd’hui craignent un potentiel effondrement du projet Européen. Une grande partie de notre continent doit à la construction européenne plus de 70 ans de paix. Nous en savons quelque chose dans notre région. Or ce narratif n’est plus opérationnel. Le projet de coopération Européenne pour construire un espace de paix, de liberté, de démocratie, de justice, de progrès social n’est plus une priorité pour beaucoup de nos concitoyens, notamment chez les jeunes générations. Considérant la paix comme normale et acquise, parce qu’ils l’ont toujours connu, les jeunes générations délaissent l’œuvre de réconciliation entre les peuples, l’importance de l’entente des états dans une coopération solidaire. Dans de nombreux pays européens les enjeux de proximité l’emportent aujourd’hui. Partout sur notre planète, des logiques de repli sont à l’œuvre, oubliant en cela que le bien commun et l’intérêt général sont également l’intérêt de chacun. Les sentiments d’insécurité, d’insatisfaction ou de peur prennent le dessus. Ils représentent une indiscutable menace pour le projet de paix, de liberté, de progrès social, de démocratie qui est au cœur de la construction européenne. On croit l’Union européenne solidement établie, et en même temps suffisamment lointaine, pour se permettre un vote défouloir sans conséquence. Et personne ne se souvient que durant l’été 1989, nul n’aurait cru un instant que le mur de Berlin puisse tomber, et l’Union soviétique s’effondrer de l’intérieur, sans effusion de sang.

Pourchasser la paix, avec cette interpellation, le psalmiste veux nous encourager à un permanent effort de justice et de réconciliation ; non pas pour nier la conflictualité dans nos existences personnelles, institutionnelle, ecclésiales, mais pour toujours promouvoir la rencontre, l’écoute et le dialogue. Car il nous faut toujours à nouveau réapprendre à dépasser la peur de l’autre, la méfiance, la suspicion et l’ignorance, en allant à sa rencontre pour construire des ponts de connaissance et d’amitiés. C’est ainsi qu’il nous sera donné d’arpenter ensemble des chemins de la paix et de fraternité. C’est par l’œuvre de réconciliation qui dépasse la conflictualité de nos existences que nous apprenons à aimer comme Dieu nous a aimé.


Christian Krieger, vice-président de l’UEPAL
 

infos CP décembre 2018

Attendre…

C’est ce que nous n’aimons pas faire et c’est pourtant ce à quoi nous invite ce temps de l’Avent. En fait, notre temps est tissé d’attentes au quotidien : un paquet, une lettre, le coup de fil d’un proche, un rendez-vous, un emploi, une guérison, de meilleures conditions de vie… La liste est longue de nos attentes, dont notre société s’évertue à nous faire croire qu’elles peuvent être comblées tout de suite et maintenant. Les attentes multiples des gilets jaunes sont à leur manière l’expression de cette impatience. En réalité, ces impatiences quelquefois violentes sont l’expression malheureuse d’une attente bien plus profonde à laquelle nous ne savons plus répondre : le besoin d’être écouté, entendu, de prendre le temps de la réflexion et du dialogue.

Notre société technicienne et marchande est arrivée à ses limites : « les enfants du vide »* que nous sommes devenus, malgré l’abondance des biens matériels qui miroitent dans les rues et sur les écrans de nos ordinateurs, ont perdu leur horizon et n’osent plus se poser la question du sens : tout se vaut, tout est possible - malheureusement pas pour tout le monde. Nous avons surtout perdu le sens de la « grande attente », celle que Dieu nous propose, celle qui ouvre l’avenir et l’espérance, celle qui se concrétise dans un signe aussi fragile que l’enfant de Bethlehem. Cette attente suppose que nous acceptions nos limites et notre fragilité, et que nous recevions la réponse à nos attentes comme un don, qui ne dépend pas de nous. Cela ne nous dispense pas d’agir et de nous engager, mais nous invite à le faire en reconnaissance pour le don gratuit de Dieu, avec l’espérance du Royaume pour horizon.

Contribution modeste mais significative de l’UEPAL à ce besoin de dialogue et d’écoute : la création ces jours-ci de la radio RCF Alsace, portée en commun avec le diocèse catholique de Strasbourg, et ouverte à toutes celles et ceux qui veulent « se poser » pour prendre le temps du recul et des questions essentielles. Depuis le 5 décembre, elle propose 4h30 de programme régional s’inscrivant dans la grille du réseau national des 64 radios locales. Il s’agit d’un projet résolument œcuménique, dont la ligne éditoriale s’inscrit dans le slogan « La joie se partage ! ». La radio est un média qui devrait être particulièrement cher aux protestants, puisqu’il place la parole et l’écoute au centre. Notre souhait est que RCF Alsace devienne votre radio, qu’elle accompagne vos journées et vous permette, si vous le souhaitez, d’en être acteurs, tant à travers la participation à des émissions, qu’à travers votre soutien matériel et financier. Pour écouter RCF Alsace, il vous faut disposer d’un poste RNT (Radio Numérique Terrestre) mais vous pouvez aussi l’écouter sur votre ordinateur en tapant « RCF Alsace » ou avec l’application RCF sur votre téléphone.
Alors, à quelques jours de Noël, saluons cette naissance, accueillons cette parole qui veut nous inviter à recevoir la Parole qui s’est faite chair en Jésus. À toutes et à tous, je souhaite un heureux Noël, dans la paix et la joie du Christ et une entrée dans l’année nouvelle avec confiance et espérance !

 

Christian Albecker, président de l’UEPAL


* Titre d’un récent ouvrage de l’essayiste Raphaël Glucksmann
 

infos CP : novembre 2018

Poursuivre l’œuvre de réconciliation

Nous commémorons ces jours-ci le 100e anniversaire de la signature de l’armistice de 1918 mettant fin au premier conflit mondial. Malencontreusement le traité de Versailles n’inaugurera pas une période de paix mais celle d’un entre-deux guerres où nationalisme et fascisme continueront à attiser les animosités, occasionnant une descente aux enfers jusqu’à l’abîme de la Shoah.

Des ruines d’un malheur innommable a surgi un puissant élan en quête de paix, de justice, de démocratie, de liberté, de solidarité. Cette quête exigeait une profonde révision du rapport à l’autre pour pouvoir le considérer comme un partenaire, un frère ou une sœur en humanité, voire dans la foi. Sur ces fondements, le projet européen prenait son essor, nous valant plus de 70 années de paix sur ce continent tant ravagé par les conflits. Et entre les confessions chrétiennes, l’œcuménisme s’est affirmé et structuré au niveau mondial, européen, local. Le rapport au judaïsme a connu un considérable travail théologique pour reconnaitre le lien tout à fait spécifique qui lie le christianisme et le peuple de la première alliance. Cette œuvre de réconciliation et de paix, qui a forgé durant la seconde moitié du XXème siècle, le monde dans lequel nous vivons aujourd’hui, n’est pas achevée. Elle nécessite en permanence que les générations qui se succèdent se l’approprient.

Or, d’aucuns, non sans raison, craignent aujourd’hui une déconstruction de ce monde. De nouvelles formes d’antisémitisme surgissent. Le dialogue théologique entre les familles ecclésiales ne produit guère d’avancées significatives et tout un pan du christianisme (évangéliques, pentecôtistes, charismatiques…) ne se sent pas concerné par l’œcuménisme. Quant à l’Europe, elle est bien loin de traduire dans ses politiques actuelles les valeurs de liberté, de progrès social, de solidarité, de droit qui animaient ses fondateurs. Un important sentiment de peur, d’insatisfaction et d’insécurité s’exprime partout en Europe, parallèlement on observe l’éparpillement des structures politiques et l’absence de réel leadership politique. Il nous faut poursuivre l’œuvre de réconciliation pour ne pas assister à « un déjà vu ».

Sur le plan œcuménique, une initiative récente, le Forum Chrétien mondial créé en 1998, a ouvert une nouvelle voie. Sa démarche est toute simple. Elle consiste à tenter de rassembler des représentants de toutes les familles ecclésiales en veillant à une certaine proportionnalité (50% de personnes issues d’Églises historiques – catholiques, luthériens, réformés, anglican, orthodoxes – et 50% de personnes issues d’Églises émergeantes – évangéliques, pentecôtistes, charismatiques…) ; et à animer un espace de rencontre et d’échange en petits groupes autour d’une question « comment as-tu rencontré Jésus-Christ ? ». Si cet exercice est inhabituel pour un protestant, voire parfois le met mal à l’aise, force est de constater que cette démarche permet de porter son attention sur ce qui est commun et de construire un réel climat de confiance qui permet d’aborder dans un état d’esprit apaisé les sujets de désaccord.

Du 28 au 31 octobre 2018 à Lyon s’est tenue la première rencontre du Forum Chrétien Francophone. Dans un message aux chrétiens et chrétiennes de toutes les Église les participants du forum affirment : « Nous avons pris conscience dans nos échanges qu’entre nos Églises des différences importantes demeurent et peuvent toujours occasionner des blessures. Nous avons surtout discerné que c’est le même Père qui nous appelle, le même Christ que nous cherchons à suivre et le même Esprit qui nous anime. Cela nous encourage à construire l’amitié et la fraternité entre nous et à bâtir des ponts de réconciliation entre nos Églises. Notre témoignage de l’amour de Dieu pour les êtres humains et du salut en Jésus-Christ sera ainsi plus clair pour nos contemporains. »*

Cette démarche illustre, si besoin en était, qu’il y a bien des voies à explorer pour ceux qui croient que Dieu fait toute choses nouvelles. Alors poursuivons l’œuvre de réconciliation !

* Cf. https://forumchretienlyon2018.org/message-aux-chretiens-et-chretiennes-de-toutes-les-eglises

Christian Krieger, vice-président de l’UEPAL
 

infos CP : octobre 2018

Depuis 2007, les Églises chrétiennes d’Europe célèbrent en septembre le temps de la création (voir Édito d’Infos CP septembre 2018 de Christian Krieger). Le 8 septembre était la « journée mondiale d’action pour le climat », qui selon les observateurs, a suscité en France la plus grande manifestation pour le climat jamais organisée dans l’Hexagone. La prise de conscience de l’« urgence climatique », avec son cortège de catastrophes naturelles et d’injustices croissantes pour l’accès aux ressources de la planète, gabegie pour les uns, misère pour les autres, affecte de plus en plus nos consciences et nous invite à une véritable conversion collective de nos modes de vie.

Dans notre « pré carré » alsacien, cet enjeu se traduit de manière aigüe par la « crise du GCO ». Confrontés à une situation concrète, des paroisses, avec leurs conseils et leurs pasteurs, se sont mobilisés contre cet équipement. Je suis interpelé à ce sujet par des membres de notre Église, des élus, des responsables économiques : est-ce le rôle des pasteurs et des paroisses que d’intervenir dans ce type de débat ? Je réponds : oui, bien sûr ! Si les déclarations d’intention de nos assemblées et nos labels « Église verte » ne sont pas que du « verdissage » (en anglais greenwashing) pour notre « marketing ecclésial », alors il arrive que dans des situations concrètes il faille « se mouiller » et prendre quelques risques ! Je ne sais pas si Dieu est pour ou contre le GCO (bien que j’aie ma petite idée sur la question !) et il ne nous appartient pas de le convoquer, même pour des causes que nous croyons justes (l’histoire nous a montré à quel point cela pouvait être dangereux !). Mais Jésus a prêché la justice et la paix pour ici et maintenant, et c’est notamment pour des raisons politiques qu’il a été crucifié. À cause de l’Évangile, nous avons donc le droit, et même le devoir d’interpeller les pouvoirs publics sur des situations d’injustice, sur le sort des réfugiés ou sur la manière dont est prise en compte la crise écologique que nous vivons.
Je suis allé à Kolbsheim rencontrer les pasteurs et la poignée de ZADistes. J’y ai trouvé des personnes, notamment la vice-présidente du Conseil presbytéral, choquées profondément par ce qu’elles avaient vécu et la violence déployée envers des personnes pacifiques. La gestion du dossier du GCO est à ce titre très problématique : la manière dont les décisions ont été prises et mises en œuvre, sans tenir compte de toutes les consultations et avis défavorables, donne l’impression que ces enquêtes ne sont que de pure forme, pour une décision déjà prise par avance. Cela met en cause la confiance dans la démocratie représentative : j’en veux pour preuve le fait inquiétant que des manifestants du 8 septembre ont déchiré leur carte d’électeur.

Celles et ceux qui critiquent le projet – experts environnementaux, élus locaux, responsables associatifs ou représentants des cultes – ne sont pas tous des illuminés irresponsables. Et je peux témoigner du fait que les pasteur(e)s qui se sont impliqué(e)s dans ce débat le font aussi dans le cadre de leur responsabilité pastorale d’accompagnement de leurs communautés et des personnes engagées sur le terrain. Ils et elles ont ainsi contribué, comme je les y ai rendu attentifs, au caractère pacifique des manifestations et à l’évitement des débordements violents.

Certes, les ZADistes sont des utopistes, qui rêvent d’un monde radicalement autre. Ils sont sensibles au fait que des chrétiens les accompagnent au nom de leur foi. Ils m’ont rassuré sur le fait que dans notre monde de réalités impitoyables il soit encore permis de rêver.

Christian Albecker, président de l’UEPAL
 

infos CP : septembre 2018

La rentrée, un temps pour la Création

Pour les chrétiens rentrée rime désormais avec « temps pour la Création ». Quelle que soit leur confession, luthérienne, réformée, catholique, orthodoxe, anglicane, la période de la rentrée scolaire est désormais associée à un moment particulier, à un temps dédié à la thématique de la Création. L’origine de cette idée revient au patriarche Dimitrios 1er de Constantinople qui en 1989 a proclamé le 1er septembre « jour de prière pour la Création » pour les Églises orthodoxes. Ce geste précurseur s’inscrit dans le contexte des réflexions alors menées par le Conseil Œcuménique des Églises et le premier rassemblement œcuménique européen de Bâle « Paix, justice, sauvegarde de la Création » dont l’intuition principale était justement que la paix n’est pas possible sans justice, et la justice n’est pas accessible sans la sauvegarde de la Création. Progressivement les Églises de par le monde, l’Église luthérienne d’Australie en 2000, les évêques catholiques des Philippines en 2003, se sont emparés de cette thématique et ont décrété une période dédiée à la thématique de la Création et de sa sauvegarde. Le troisième rassemblement œcuménique européen de Sibiu en 2007 a définitivement dédié la période allant du 1er septembre au 4 octobre (jour de la Saint-François) comme « saison de la Création ». L’urgence climatique croissante et l’encyclique papale Laudato Si de 2015 ont fini par sanctuariser le concept.

Et voici donc qu’en 2018, les 31 août et 1er septembre à Assise, pour la première fois, une célébration œcuménique européenne inaugure la saison de la Création. Ce temps pour la Création s’articule autour de cinq axes :

  • la célébration commune du Dieu Créateur,
  • l’expression commune de notre gratitude pour Sa grâce et pour le don de toute vie,
  • l’expression devant Dieu de notre repentance face à la surexploitation des ressources naturelles et la défiguration de notre environnement,
  • la prise de conscience de notre responsabilité envers tous les humains et envers toute la Création,
  • l’engagement à agir ensemble pour la sauvegarde de la Création et le développement durable.

Dans la déclaration proclamée lors du lancement de la Saison de la Création 2018, les Églises et ONG chrétiennes affirment « notre appel inébranlable en faveur de la justice climatique continue d’être une priorité importante. Nous croyons que Dieu nous a appelés à de justes relations les uns avec les autres et avec la Terre. Nous reconnaissons que la crise actuelle est due au fait que nous n'avons pas répondu à l'appel de Dieu à aimer la création et les autres et que nous avons plutôt cherché à nous intéresser à nous-mêmes. Nous cherchons à retourner au Dieu de la vie et à entendre le gémissement de toute la création qui cherche la rédemption (Romains 8 : 19-21). ».

Christian Krieger, vice-président de l’UEPAL
 

Infos CP : juillet 2018

Au moment où j’écris ces lignes, la France retient son souffle à quelques heures du match décisif contre la Belgique qui décidera si notre pays accèdera à la finale de la coupe du monde de football. Faut-il à cette occasion déplorer la concurrence « religieuse » d’un sport qui draine les foules dans une ferveur que nous aimerions voir orientée vers d’autres causes ? Faut-il récuser la superstition de ces joueurs qui mêlent le ciel, par des signes explicites, à leur réussite d’un instant ? Constater l’éternel penchant de l’être humain à rechercher « du pain et des jeux » plutôt que la solution des vrais problèmes ? Dénoncer la toute-puissance de l’argent roi et la récupération politique de ce genre de manifestation ? Oui sans doute.

Et pourtant, comment ne pas être sensible au plaisir simple de voir l’humanité communier dans un événement qui met entre parenthèses la dure réalité de notre monde ? Cette coupe du monde agit un peu comme une récréation mondiale dont l’humanité aurait besoin pour respirer et s’accorder un temps de légèreté et d’insouciance. Nous le savons : les vrais problèmes demeurent et, la coupe du monde terminée, seul le courage et la lucidité permettront de faire face aux enjeux d’aujourd’hui et de demain. Mais ne boudons pas notre plaisir devant cette joute symbolique, parabole d’une humanité qui confronte pacifiquement ses différences, en sachant que, hier comme aujourd’hui, nous n’avons d’autre chemin à proposer, en tant que chrétiens, que celui de la foi, de l’espérance et de l’amour.


La réalité de notre monde reste évidemment préoccupante, avec la division de l’Europe sur la question des migrants, sans doute à la fois cause et conséquence de la montée des populismes. Revenant en ce début juillet du Conseil de la Fédération luthérienne mondiale à Genève, je suis frappé par le kaléidoscope que représente cette communion de 148 Églises présentes dans une centaine de pays, représentative des tensions entre le nord et le sud, dans ses inégalités économiques et financières génératrices de flux migratoires, et dans ses conceptions éthiques, sociales ou politiques quelquefois antagonistes. J’ai été heureux de constater que l’Évangile constitue un lien puissant capable de faire de nous des sœurs et des frères au-delà de ces tensions. Fier aussi de savoir que la FLM accompagne, à travers son service d’aide humanitaire, plus de 2,7 millions de personnes déplacées, dont 1,3 million de réfugiés à travers le monde, et qu’elle gère à Jérusalem l’hôpital Augusta Victoria, qui soigne Israéliens, Palestiniens et Gazaouis. Signes de paix dans un monde de violence, qui illustre bien le thème qui a sous-tendu nos travaux pour les cultes et les études bibliques : « Vous avez reçu gratuitement, donnez gratuitement » (Matthieu 10, 8).


En ce début de pause estivale, je nous souhaite à toutes et à tous de reprendre conscience de tout ce que nous avons reçu gratuitement et qui constitue notre vie. Peut-être est-ce là l’une des caractéristiques de la foi chrétienne : la prise de conscience que notre vie et un don, et non un dû. Rendre grâce à Dieu et nous émerveiller de ce don nous rend alors capable de donner à notre tour.


Bel été à toutes et à tous !


Christian Albecker, président de l’UEPAL
 

Infos CP : juin 2018

Impressions de Novi sad

« Vous serez mes témoins ! » Tel a été le thème de l’Assemblée générale de la Conférence des Eglises européennes (ou Conference of European Churches, CEC) qui s’est tenue du 31 mai au 6 juin à Novi Sad en Serbie. La CEC rassemble aujourd’hui 116 Eglises d’une grande diversité, qui plus est à multiple facettes : une diversité confessionnelle avec des Eglises protestantes réformées, luthériennes, baptistes et méthodistes, anglicanes, orthodoxes, vieille catholiques ; des Eglises majoritaires et minoritaires ; des Eglises fortes comptant leurs membres en million et des petites Eglises affichant à peine quelques milliers, voire centaines de membres. Des Eglises qui portent dans leur manière de penser et de déployer leur témoignage à l’Evangile la marque de leur ancrage culturel et historique. Des Eglises qui reflètent toute la diversité de ce vaste espace européen allant d’Islande à Chypre et de la Finlande au Portugal, sans oublier l’Eglise protestante en Russie.

Par-delà les multiples facettes de cette diversité, et conscientes des écarts, voire des séparations, qu’induisent leurs compréhensions respectives de l’Evangile, notamment sur le plan ecclésiologique, ces Eglises affirment clairement leur attachement à cet instrument commun qu’est pour elles la CEC. Toutes sont confrontées, quoi que différemment, à la question de la sécularisation et ressentent comme une nécessité de mieux appréhender le témoignage de l’Evangile. Et pour elles, la CEC est à la fois l’outil qui doit construire, renforcer et approfondir leurs liens et donc la communauté des Eglises, et le support de leur témoignage commun en Europe et pour l’Europe. Fondée en 1959 pour développer la solidarité ecclésiale entre l’est et l’ouest, la CEC est comme génétiquement marquée par la volonté de contribuer à la réconciliation des peuples et ainsi à la paix et la justice (parce qu’il n’y a pas de paix sans justice). L’expression “bridge building” (construire des ponts) y résonne régulièrement comme un mot d’ordre. Aussi la CEC et ses Eglises membres se sentent très concernées par l’évolution du projet européen qui, longtemps considéré comme la solution, est maintenant regardé comme le problème. Les questions de l’euroscepticisme, la montée des populismes, la justice sociale, l’accueil digne des réfugiés, mais aussi les défis globaux qui nécessitent une réponse commune, comme la justice climatique, le terrorisme, les questions bioéthiques… sont donc nécessairement au cœur du travail de la CEC.

Le thème « Vous serez mes témoins ! » a été décliné autour de trois thématiques « hospitalité », « justice », « espérance ». Il ressort des échanges et des débats que la question du témoignage est abordée diversement. Les uns le conçoivent principalement comme la proclamation de l’Evangile visant à susciter la foi. D’autres privilégient la célébration de la sainte liturgie pour attester la présence d’Eglise. D’autres encore comprennent l’appel à être témoin comme le service à rendre à chaque être humain, notamment aux nécessiteux. D’autres encore comprennent le témoignage comme l’appel à être porteur d’une parole prophétique dans la société. Antje Jackelén, Archévêque d’Uppsala, a développé une compréhension du témoignage autour de cinq axes : contribuer au débat public, construire des relations de confiance, relever le défi de l’injustice, découvrir des signes d’espérance, relever les nécessiteux.

Je reste personnellement très marqué par le témoignage apporté par l’Eglise protestante de Grèce, une très petite Eglise qui, confrontée à l’arrivée de réfugiés sur le sol grec, s’est laissé interpeller par la présence de femmes, d’enfants et d’hommes en quête d’accueil. Au lieu de réfléchir à ce que leurs moyens et ressources permettaient de produire, cette Eglise s’est attelée à la tâche, et de fil en aiguille, pas après pas, question après question, a livré un merveilleux témoignage chrétien, bien au-delà de son propre potentiel. Belle leçon pour toutes celles et tous ceux qui se meuvent dans leur zone de confort.

Christian Krieger, vice-président de l'UEPAL

INFOS CP : MAI 2018

En ce mois de mai, les chrétiens fêtent la Pentecôte, célébration à la fois de l’Esprit Saint, du « souffle saint », et de la naissance de l’Église. Ce rapprochement entre la fête de l’Esprit Saint et celle de l’Église n’est pas fortuit. Dans le Premier Testament, « Shavouot », 50 jours après la Pâque juive « pessah », était la fête des récoltes devenue progressivement la fête du souvenir de la transmission des Tables de la Loi à Moïse, c’est-à-dire la célébration de l’Alliance de Dieu avec son peuple. A ce premier glissement de sens (les vrais fruits sont ceux du respect de la Loi), les chrétiens en ont ajouté un second, faisant de la Pentecôte la fête de la nouvelle alliance de Dieu avec la communauté des baptisés, l’Église. Mais ce qui est surtout nouveau, c’est d’associer à cette naissance la présence-même de l’Esprit, le « rouah », le « souffle saint » du Premier Testament. Cela veut dire en clair pour les chrétiens : « c’est désormais à travers vous, à travers vos actes et vos témoignages que Dieu est présent dans le monde ». Conséquence ultime de l’incarnation en Jésus-Christ, Dieu n’est plus l’Être supranaturel qui tire les ficelles du monde et du destin, il est présent dans le monde à travers vous dans la mesure où vous faites place à son Esprit.

Vaste programme ! Il est sans doute assez simple (quoi que !) de cultiver sa piété personnelle par la prière, la fréquentation des Écritures, la participation au culte… et tout cela est indispensable pour nourrir notre foi. Mais il est certainement beaucoup plus difficile de vivre notre foi en étant conscients que nous sommes les « vases d’argile » qui portent la présence de Dieu dans le monde. Notre vocation c’est d’être ou de devenir des « Christoforos », des porteurs ou des passeurs du Christ, sans confondre nos propres projets, fantasmes ou militances avec le message de l’Évangile. Nous sommes confrontés à cette double et difficile exigence de traduire la Bonne Nouvelle de l’Alliance de Dieu avec tous les hommes dans des actes et des engagements concrets, et de ne pas confondre ceux-ci avec la volonté de Dieu. Cela s’appelle le discernement et l’humilité. Les occasions de témoigner de la justice et de l’amour de Dieu pour le monde sont innombrables : elles vont de la solidarité sociale (pensons aux grèves actuelles) à la solidarité environnementale (voir les débats autour du GCO) et à l’engagement politique (vigilance vis-à-vis des extrémismes et autres nationalismes) sans oublier l’accueil des réfugiés, la présence auprès des plus faibles, malades, personnes âgées ou handicapées, … La spécificité chrétienne est de ne jamais concevoir ces engagements autrement que comme des signes de la présence de Dieu, et de ne pas les absolutiser.

Que Pentecôte nous invite à être toujours plus des hommes et des femmes responsables, et des chrétiens pleinement engagés, dans la conscience que ce n’est pas de nous que dépend le salut du monde et la venue du Royaume, mais que nous devons en manifester les signes.

Christian Albecker, président de l’UEPAL
 

infos CP : mars 2018

« J'en prends aujourd'hui à témoin le ciel et la terre : j'ai mis devant toi la vie et la mort, la bénédiction et la malédiction. Choisis la vie, afin que tu vives, toi et ta postérité ! » Deutéronome 30, 19
L’antique interpellation biblique est plus actuelle que jamais et nous situe en êtres responsables, capables de faire des choix : si le monde va mal, si la planète est exténuée par notre surexploitation, si les guerres et la violence sévissent, si notre Europe politique est mal en point, ce n’est pas le résultat d’une obscure fatalité, c’est parce que nous faisons ou avons fait des choix, ou laissons d’autres les faire pour nous. Mais les choix sont difficiles, la complexité et l’enchevêtrement des problèmes sont tels que les choses sont rarement aussi simples que de choisir entre A et B, blanc ou noir, vie ou mort… Et quand bien-même nous serions lucides ou chercherions à nous informer le mieux possible sur les données des problèmes auxquels nous devons faire face, notre volonté est entachée par l’incapacité à faire le bien : « Ce qui est bon, je le sais, n'habite pas en moi : j'ai la volonté, mais non le pouvoir de faire le bien. Car je ne fais pas le bien que je veux, et je fais le mal que je ne veux pas. » Romains 7, 18-19. L’invitation du Deutéronome à choisir la vie se heurte donc à notre incapacité à vouloir et à faire le bien.
Mais c’est là la nouveauté radicale apportée par le Christ : le « ou/ou » est dépassé par le « et/et ». Le chemin que Jésus nous propose n’est pas binaire pur/impur ou bien/mal (autrement dit ce n’est pas un chemin dont le critère est la moralité ou l’accomplissement de « bonnes œuvres »). Le chemin qu’il nous propose est une « suivance » (« Nachfolge » en allemand) où le bien et le mal, le pur et l’impur, le bon grain et l’ivraie (la zizanie en grec !) s’enchevêtrent, mais un chemin où la vie nous est donnée, plutôt que nous ne la choisissons. Ce don gratuit est celui du matin de Pâques : c’est parce que Jésus a refusé la logique implacable du dualisme bien/mal, pur/impur, parce qu’il a toujours placé ses interlocuteurs devant leurs propres contradictions, parce qu’il a accepté d’affronter la mort, que la vie lui a été donnée et nous est donnée avec lui.
Sommes-nous pour autant déresponsabilisés ? C’est quelquefois la critique que l’on entend : le message de la vie offerte gratuitement par Dieu, le pardon et la grâce seraient des pommades faciles sur les plaies ouvertes de l’humanité. « La grâce facile » qui ferme les yeux sur le mal scandalisait déjà Dietrich Bonhoeffer, dont nous fêtons ce 9 avril le 73ème anniversaire de la mort. Le prix de la grâce, c’est la croix du vendredi saint : le Christ l’a portée, mais nous devons la porter avec lui, accepter nos morts pour accéder avec lui à la vie. Promis à la vie, nous pouvons affronter la mort, quelle que soit son nom : maladie, deuil, violence. Et agir pour la vie, non comme des purs qui savent, mais comme des humbles qui cherchent, et dont les paroles et les actes témoignent de la vie offerte en Christ.
Belles fêtes de Pâques à toutes et à tous !

Christian Albecker, président de l’UEPAL
 

infos CP : février 2018

En ce mois de février nos paroisses s’apprêtent à renouveler leurs conseils presbytéraux. Cette étape importante de la vie de nos Églises pose immanquablement la question de la vitalité du protestantisme alsacien et mosellan. Se trouvera-t-il le nombre de candidats nécessaires ? Faut-il procéder à une opération vérité et réviser le fichier paroissial pour le recentrer sur les personnes qui manifestent d’une manière ou d’une autre un attachement à l’Église ? Peut-on fonctionner avec un conseil presbytéral incomplet ? Ne faudrait-il pas réviser plus globalement l’organisation de la vie ecclésiale pour l’adapter aux réalités sociologiques actuelles ?

Force est de constater que ces élections sont un indicateur de la vitalité de notre protestantisme, mais aussi que ce dernier présente un visage très disparate. Si certains connaissent le difficile sentiment de voir filer comme le sable dans la main ce qui n’est plus, d’autres se réjouissent d’une vie d’Église qui sait tracer une voie dans ce monde en profonde mutation, d’un projet de paroisse qui a visiblement su se renouveler pour répondre aux attentes religieuses contemporaines.

Alors que nos vies se densifient de mille choses qui nous occupent, et souvent nous préoccupent, et que nos existences démultiplient l’horizon des découvertes et des rencontres, des projets et des rêves, sans compter les défis sociaux, économiques, environnementaux qui mobilisent notre solidarité ainsi que notre militance, la question religieuse n’est souvent plus qu’un élément parmi d’autres. Si la spiritualité et la quête de sens s’imposent à l’occasion d’une naissance, d’une maladie ou d’un deuil, pour beaucoup elles demeurent habituellement plus discrètes dans le rythme effréné de la vie.

Être élu conseiller presbytéral aujourd’hui, c’est bien sûr accepter d’entrer dans un comité qui porte la responsabilité de la gestion matérielle et spirituelle d’une présence d’Église en un lieu donné – y compris avec tout le poids de l’héritage légué par cette histoire à laquelle nous sommes tant attachés. Toutefois, au regard des mutations évoquées, une Église qui se dit protestante ne peut pas se contenter de répéter un modèle de projet de paroisse hérité, sans travailler en permanence deux questions « quelles sont les attentes religieuses contemporaines » et « comment entrent-elle en résonnance avec le message libérateur de l’Évangile ». Être élu conseiller, c’est avant tout accepter d’entrer dans la perspective de travailler avec assiduité ce double questionnement.

Il y a bien sûr des tâches qui n’attendent pas quand il faut créer un secteur, régler une urgence financière, trouver un nouveau pasteur… Mais, et nous l’avons abondamment rappelé en 2017, la vérité en protestantisme n’est pas structurelle, elle est de l’ordre de la parole, de cette parole qui fonde l’Église, en la faisant surgir là où elle résonne dans les cœurs et interpelle les esprits.

Le mot d’ordre du mois de février proclame la proximité de cette parole avec tout un chacun*. Et ce faisant, il énonce une promesse qui ouvre, aussi pour ceux qui acceptent de s’engager pour l’Évangile, un espace de confiance, voire d’espérance si le chemin devait s’avérer plus rude.

* « La parole est toute proche de toi, elle est dans ta bouche et dans ton cœur, pour que tu la mettes en pratique. » DT 30.14

 

Christian Krieger, vice-président de l’UEPAL
 

INFOS CP : JANVIER 2018

« À celui qui a soif, je donnerai de la source de l'eau de la vie, gratuitement. » Apocalypse 21,6

Le mot d’ordre qui nous est donné pour 2018 évoque l’environnement du Moyen-Orient, où la présence du désert fait de l’eau une ressource vitale. Cette thématique de la soif, de la source et de l’eau vive se retrouve en effet assez fréquemment dans la Bible, tant dans le premier que dans le nouveau Testament. Deux exemples parmi beaucoup d’autres : « Voici, je me tiendrai devant toi sur le rocher d’Horeb. Tu frapperas le rocher, et il en sortira de l'eau, et le peuple boira » (Exode 17,6) ou « Le grand jour de la fête, Jésus, se tenant debout, s’écria : ‘Si quelqu'un a soif, qu'il vienne à moi, et qu'il boive.’ » (Jean 7,37). Assez curieusement, notre mot d’ordre 2018 se trouve dans l’Apocalypse, dans le chapitre qui décrit la fin des temps, où il y aura de nouveaux cieux et une nouvelle terre et où Dieu habitera au milieu des hommes dans la Jérusalem nouvelle. Ce texte, l’un des fondements de l’espérance chrétienne, nous décrit ce « grand soir » où le deuil, la souffrance et la mort ne seront plus et où Dieu sera tout en tous. Alors, pourquoi encore parler de soif, de source et d’eau vive ?
Je fais l’hypothèse que le voyant de l’Apocalypse veut nous rappeler précisément que nous ne sommes pas encore dans la nouvelle Jérusalem, qui nous sera donnée par Dieu. Nous sommes encore en route, sur un chemin où nous avons besoin de nous rafraîchir et de renouveler nos forces. Peut-être pouvons-nous aussi comprendre que, même dans le Royaume où toute larme sera effacée, ce ne sera pas un paradis ou un Eden mythique où tous nos besoins seront satisfaits, mais que la vie en plénitude qui nous est promise consistera encore à désirer Dieu, à l’attendre et à le recevoir comme on boit à l’eau de la source.
Peut-être après une année 2017 riche en événements, en célébrations et en projets de tout genre, avons-nous besoin de nous rafraîchir à la source d’eau vive. Face aux échéances du renouvellement de nos conseils presbytéraux, qui se feront dans des contextes quelquefois difficiles, nous sommes pareillement invités à nous recentrer sur l’essentiel, qui est le Christ et l’annonce de l’Évangile. Comme Israël dans le désert, nous murmurons peut-être devant les difficultés. Le mot d’ordre 2018 nous invite à la confiance : Dieu pourvoira !
À vous toutes et tous, dans vos vies personnelles, familiales, professionnelles, dans vos vies paroissiales, locales ou sectorielles, je souhaite que vous soyez animés par la vraie soif qui est de chercher force et rafraîchissement au bon endroit : auprès du Christ vivant et de son Évangile !
Bonne année 2018 !

Christian Albecker
Président de l’UEPAL
 

Infos CP : décembre 2017

L’un des faits marquant de ce premier dimanche de l’Avent, est l’introduction d’un changement, pour le christianisme francophone, dans la récitation du Notre Père. Depuis 1966, catholiques, protestants et orthodoxes en francophonie priaient « ne nous soumets pas à la tentation ». Dorénavant nous allons dire – toujours ensemble – « ne nous laisse pas entrer en tentation ».

L’histoire de l’introduction de ce changement est croustillante. Il tire son origine d’un processus de révision auquel l’Église catholique romaine soumet ses textes liturgiques toutes les deux ou trois décennies. La question qui a occasionné ce changement est de savoir si Dieu est tentateur, s’il préside à la tentation. Or, aujourd’hui, plus que par le passé, les croyants se refusent à envisager une telle compréhension de Dieu.

La Fédération protestante de France avait en son temps été consultée par la Conférence des évêques de France sur l’opportunité d’introduire ce changement. Son président n’avait alors pas saisi l’opportunité d’y réfléchir plus amplement, ni d’associer ses Églises membres à cette consultation. Cela aurait peut-être permis de relever d’autres points discutables où la traduction récitée s’écarte dans sa compréhension contemporaine du texte grec du Nouveau Testament. Cela est notamment le cas du mot Peirasmos, traduit par tentation, et qui signifie à l’origine “épreuve“(1). Pour nous et nos contemporains, le terme « tentation » est davantage lié aux domaines sexuel et alimentaire. Il nous fait plus penser au chocolat et aux autres délices de la table qu’à la difficile traversée d’un temps éprouvant.

Toujours est-il, que l’argument qui prévalut à la décision des Églises protestantes de recommander aux paroisses et lieux d’Église d’utiliser la traduction retenue par les Églises catholiques francophones est d’ordre œcuménique. En récitant une même traduction du Notre Père, nous reconnaissons les chemins de réconciliation parcourus par le mouvement œcuménique depuis le début du XXe siècle et nous affirmons l’importance du lien fondamental qui unit tous les Chrétiens en Jésus-Christ, par-delà leur diversité.

Cette période de l’Avent, offerte pour préparer théologiquement et spirituellement la fête de Noël, nous invite à méditer plus globalement le message de la prière que Jésus a enseigné à ses disciples, notamment en considérant que :

  • Jésus nous enseigne à dire NOUS, et non JE, même dans la chambre la plus retirée, la porte verrouillée ! Dans la prière la plus intime, il nous invite à quitter les particularismes pour toujours et résolument situer notre rencontre avec Dieu dans un horizon universel ;
  • Jésus nous apprend à nous adresser à Dieu comme un Père (littéralement ”papa“), pour découvrir sa proximité dans nos existences et comprendre que Dieu est d’abord à rencontrer, à expérimenter dans un questionnement confiant ;
  • En invoquant celui qui est aux cieux, au-delà de l’atteignable, Jésus nous donne de comprendre que ce Dieu Père est en même temps le tout-Autre qui se tient au-delà de nos compréhensions et de nos discours à son sujet, qu’il est d’abord celui qu’aucune de nos paroles, ces vases d’argiles, ne saurait enclore. Et de ce fait, le Christ nous invite à accueillir humblement les autres compréhensions de Dieu et leurs expressions de foi ;
  • Jésus nous invite à nous ouvrir à la réalité céleste de Dieu, pour en invoquer la pleine réalisation pour nous, notre humanité et notre terre.

Que donc, la récitation de cette prière enseignée par Jésus, invite toute la chrétienté

  • à expérimenter Dieu,
  • à reconnaître son irréductible altérité,
  • à préserver inlassablement la fraternité qui unit tous les enfants de la terre,
  • à espérer ce règne de paix et de justice annoncé et réalisé en Christ.


Christian Krieger, vice-président de l’UEPAL

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(1) Le terme est notamment utilisé dans le livre de l’Exode pour qualifier l’épreuve que représente la traversée du désert.
 

infos CP : novembre 2017

Que dire d’autre après « Protestants en fête » qu’un immense MERCI ?
Merci à Dieu et aux frères !

  • Merci à Dieu, qui nous a permis de vivre une magnifique fête pour le cœur, les yeux, les oreilles et la tête (les bras et les jambes étaient quelquefois moins à la fête…) et qui nous a préservés de toute violence ou drame qui aurait pu affecter les innombrables visiteurs.
  • Merci aux frères, en particulier au frère Bernard Saettler, le pilote de ce fringant paquebot, à son équipe de copilotes et à toutes celles et ceux qui, bénévolement ou dans le cadre de leur travail, se sont dépensés sans compter, quelquefois jusqu’aux limites de l’épuisement, pour que la fête soit belle.
  • Merci enfin à vous toutes et tous qui êtes venus prier, chanter, écouter, réfléchir, discuter dans un beau climat de fraternité et d’allégresse. Oui, nous sommes nombreux dans la région et bien au-delà à avoir vécu ces trois jours comme un temps de grâce. Pour beaucoup, ce fut un encouragement, l’invitation à persévérer dans leur engagement chrétien ou à repartir avec un nouvel élan !

Un bilan exhaustif sera fait fin novembre par le Conseil d’administration de l’association PEF. Le bilan humain, quantitatif (11 000 personnes inscrites et probablement 3 à 4 000 participants libres) et qualitatif (contenu des manifestation, organisation, …), est clairement positif. Le bilan financier, bien que non définitif à ce stade, sera proche de l’équilibre. L’aventure en valait donc la peine ! Et il convient aussi de mentionner l’écho dans les médias (en particulier dans les médias sociaux, mais aussi dans la presse écrite, la radio et la télévision) et l’accroissement de la visibilité du protestantisme que l’événement aura générés.

Une mention spéciale doit être faite de l’opéra « Luther ou le mendiant de la grâce », qui a été une extraordinaire aventure humaine, artistique et spirituelle. Marquée par la disparition du compositeur Jean-Jacques Werner, elle a été vécue avec un bonheur perceptible par les interprètes, chanteurs et instrumentistes, qui ont porté avec joie des rôles et des partitions difficiles. Là aussi, le succès a été au rendez-vous, avec des représentations à guichet fermé, un public séduit par la qualité de l’œuvre, de son interprétation et de sa mise en scène. Le résultat financier n’est pas encore connu, mais les nombreux soutiens financiers et logistiques dont nous avons bénéficié devraient nous permettre de tenir le budget, et constituent surtout un indicateur de l’intérêt et de la confiance suscités par la démarche.

Maintenant que stress et enthousiasme sont retombés, il nous faut reprendre souffle ! S’il est bienfaisant de nous réjouir et de faire la fête, rappelons-nous que celui qui en est la source est venu dans la pauvreté, le dénuement et la discrétion. Je forme le vœu que le temps de l’Avent qui s’annonce nous permette de nous recentrer sereinement sur ce cœur de l’Évangile.


Christian Albecker, président de l’UEPAL
 

infos CP : octobre 2017

À quelques jours du rendez-vous Protestants en fête à Strasbourg, s’esquisse progressivement les contours d’un bilan 2017 très encourageant. De nombreuses et remarquables manifestations, attestant la créativité et la vitalité des protestants, sont venues ponctuer cette année commémorative.

N’en déplaise à ceux qui croyaient Luther invendable en France en raison d’une historiographie française peu flatteuse pour le réformateur allemand. La figure de Luther suscite un intérêt notoire bien au-delà des cercles protestants. En 2017, l’authenticité de sa quête spirituelle et la profondeur de sa démarche pastorale l’emportent sur les conséquences schismatiques de son action et l’insoutenable violence de certains de ces propos. De toute évidence, en 2017 Luther est une figure qui parle.

N’en déplaise aussi à ceux qui croyaient le slogan « Vivre la fraternité » retenu par la Fédération protestante de France trop banal, trop sociétal et insuffisamment évangélique. La question de la fraternité est au cœur des préoccupations de notre société et de celles des élus de notre pays. Elle pose une exigence éthique au cœur des défis contemporains que sont notamment l’accueil digne des réfugiés, la solidarité collective avec les personnes en marge ou exclues de toute vie sociale, la coexistence respectueuse et pacifique des cultes et des cultures en une société plurielle. De toute évidence, en 2017, les textes bibliques évoquant la destinée parfois tragique de personnages, qui comme Jacob et Esaü sont issus d’une même filiation et confrontés à une fraternité à construire, parle.

Le Colloque “Protestantismes convictions et engagements” organisé par la Fédération protestante de France le 22 septembre dernier à la Mairie de Paris illustre l’engouement que suscitent ces protestants qui célèbrent leurs origines, relisent leur histoire, en assument les erreurs, s’interrogent à la lumière des Écritures, cherchent à penser leur rapport à la culture, continuent à se mobiliser afin d’apporter leur contribution au devenir de la cité. En effet, fait inédit pour la minorité protestante française, l’activité générée par le colloque sur le réseau social twitter a été dans le top 5 national. La presse s’est amplement faite l’échos de l’intervention remarquée du Président de la République, saluant notamment l’esprit critique des protestants qui « a nourri la nation », l’apport de leur foi et leur rôle de « vigie de la république », leur capacité « à faire coexister sous un même toit, dans une foi partagée, des pratiques différentes, des conceptions sociales et morales parfois divergentes. » 1

En attendant de pouvoir faire un bilan plus complet, reste à vivre le grand rendez-vous de la fraternité, Protestant en fête, les 27, 28 et 29 octobre à Strasbourg. Une quinzaine d’expositions, plus d’une vingtaine de concerts, une quarantaine de conférences, une dizaine de spectacles, une demi-douzaine de films, le village des fraternités, le village des médias, la nuit des thèses, l’opéra le mendiant de la grâce, un culte XXL au Zénith, … Tout est prêt, ou presque, pour vivre un mémorable week-end. À vous de vous y inscrire, et d’inviter à s’y inscrire, pour saisir ces nombreuses occasions de rencontrer des protestants en fête. 2
 

Christian Krieger, vice-président de l’UEPAL

1 Les interventions du Président de la République, de Mme le Maire de Paris et du Président de la Fédération protestante de France sont visibles sur :
http://www.protestants.org/index.php?id=23&tx_ttnews[tt_news]=3986&tx_ttnews[year]=2017&tx_ttnews[month]=09&cHash=c0d1e636e3

2 Inscrivez-vous par internet www.protestantsenfete.org ou directement au point accueil de l’UEPAL,
1b quai Saint-Thomas à Strasbourg (du lundi au jeudi, de 8h à 18h ; le vendredi de 8h à 17h).
Vous avez une question ? Renseignements au 03 88 25 90 00

infos CP : septembre 2017

Aux deux tiers de cette année jubilaire 2017, nous avons déjà vécu de nombreuses et belles rencontres pour dire, vivre et célébrer ce en quoi la Réforme initiée par Martin Luther a profondément renouvelé notre manière de vivre la foi chrétienne et l’Église, et transformé notre vision de la société dans ses dimensions économique, sociale, politique et culturelle. À travers ces événements, l’Esprit a soufflé pour nous redonner confiance et courage, nous faire reprendre conscience de la pertinence du message de l’Évangile dans le monde d’aujourd’hui et nous inviter à en témoigner avec nos convictions protestantes.

Il reste un défi à relever : celui de « Protestants en fête » du 27 au 29 octobre 2017. L’UEPAL s’est engagée à porter cet événement pour le compte de la Fédération protestante de France et de l’ensemble du protestantisme français. Cet engagement nous invite à nous mobiliser massivement en participant à l’événement. Il est donc urgent de vous inscrire et d’encourager les membres de vos paroisses à le faire, en particulier pour être assurés de pouvoir participer au culte et à l’ensemble des animations prévues. Nous ne pouvons que vous recommander de vous inscrire collectivement en regroupant les inscriptions par paroisse ou association.

Nous devons aussi être à la hauteur de l’engagement pris en accueillant nos hôtes dans les meilleures conditions. Nous sommes donc à la recherche de plusieurs centaines de bénévoles, mais aussi d’offres d’hébergement dans l’Eurométropole de Strasbourg pour les participants venus de loin. Pour vous donner un maximum d’informations pratiques sur tous ces points, une Newsletter spécifique vous sera régulièrement transmise par notre service communication.

Au-delà de cet événement, il nous faut nous poser la question de l’« après 2017 » ou plus précisément du sens et de l’importance de l’ « événementiel » dans la vie de l’Église, qui est d’abord caractérisée par l’engagement et la fidélité dans le temps. Théologiquement, ce débat est souvent résumé par les deux termes en tension « Événement et institution ». Traditionnellement, le protestantisme privilégie l’événement – l’irruption de Dieu dans nos vies – par rapport à l’institution ecclésiale, toujours soupçonnée d’être conservatrice et de vouloir normer, contrôler, canaliser les forces de l’Esprit à son profit. Cette méfiance par rapport à l’institution est devenue générale dans notre société de l’immédiateté, que ce soit par rapport à l’école, à la justice ou à l’État. Nous reprenons cependant progressivement conscience de l’importance de l’institution : pour les chrétiens, l’événement que constitue la proclamation de la Parole ne peut exister sans une communauté incarnée, organisée et structurée par des règles, c’est-à-dire une institution. Cette institution permet d’affronter la longueur du temps et d’être présent dans l’espace public. Alors, n’opposons pas événement et institution, qui sont complémentaires et se soutiennent réciproquement. Vivons l’événement « Protestants en fête » avec joie et enthousiasme, sachant que le quotidien de l’institution, qui doit certes être sans cesse réformée et adaptée, continuera à nous porter. La perspective des prochaines élections aux Conseils presbytéraux en février 2018 nous le rappellera opportunément !

Christian Albecker, président de l’UEPAL

Inscrivez-vous par internet www.protestantsenfete.org ou directement au point accueil de l’UEPAL,
1b quai Saint-Thomas à Strasbourg (du lundi au jeudi, de 8h à 18h ; le vendredi de 8h à 17h).
Vous avez une question ? Renseignements au 03 88 25 90 09
 


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