Réflexion

Lettre de Christian Albecker

A propos du Marché de Noël de Strasbourg
février 2019

Maintenant que les décors de plus en plus fastueux du Marché de Noël ont été rangés, il faut tout de même s’interroger sur le sens de cette manifestation, de surcroît endeuillée cette année par un tragique attentat. Deux aspects me semblent particulièrement problématiques :

  • La surenchère commerciale ne connaît plus de limite et la ville croule sous les deux millions de visiteurs qui envahissent ses places et ses rues. Beaucoup de Strasbourgeois (j’en suis) ne sortent plus durant cette période pour une manifestation qui n’est plus la leur. Je fais le pari que, comme tout ce qui est excessif, ce marché va finir par s’effondrer sous son propre poids. Les Eglises protestantes avaient déjà protesté il y a quelques années contre le projet d’ouvrir le marché le 25 décembre et de le prolonger jusqu’au 6 janvier (au prétexte, nous a-t-on dit, que les orthodoxes fêtaient Noël à l’Epiphanie…), projet qui a heureusement été abandonné. Depuis une vingtaine d’années, les Eglises chrétiennes s’efforcent durant cette période de rappeler le sens chrétien de Noël, à travers diverses manifestations dont certaines bénéficient du soutien des collectivités publiques. Mais force est de constater que ces efforts sont à peine perceptibles dans cette foire généralisée. Lorsqu’en 1570, les autorités municipales protestantes avaient décidé de remplacer le marché de St Nicolas par celui de l’enfant Jésus, le « Christkindelsmärik », c’était pour que ce marché du temps de l’Avent permette de se préparer à la fête de la Nativité du Christ. Nous en sommes bien loin, et le marché de Noël est devenu quelque chose comme Halloween, car il paraît que le concept s’exporte bien en Chine ou aux Etats-Unis.
  • La surenchère commerciale est doublée depuis 2015 par une surenchère sécuritaire, dont on a malheureusement pu constater l’échec le 11 décembre dernier. Il ne s’agit évidemment pas de mettre en cause le travail des services de sécurité et le dévouement admirable dont font preuve les forces de l’ordre. Mais la mission est impossible et le résultat, c’est une ville en état de siège durant 5 semaines, Strasbourg transformée en gigantesque forteresse commerciale. C’est une contradiction absolue avec l’esprit de Noël qui est celui de la paix et de la simplicité.

Ne serait-il pas temps de réfléchir à une modération ou une stabilisation (je n’ose parler de décroissance !) du marché de Noël, à une réorientation vers plus de simplicité et de sobriété, et même à une réduction des mesures de sécurité (ce qui serait une autre manière de montrer aux terroristes qu’ils ne nous font pas peur) ?
Face aux intérêts économiques qui ont tant de mal à sortir du « toujours plus », comme le montre la crise écologique qui met notre planète en danger, serons-nous capables, en tant que consommateurs et acteurs de notre ville et de notre société, du sursaut nécessaire et décisif pour changer de comportement et nous convertir à la sobriété heureuse ?
En assumant la critique de ces propos, je ne pense pas être rêveur, rétrograde ou ennemi du commerce. Mais aux côtés de celles et ceux qui se battent pour plus de justice (sociale, économique et climatique) et de paix, je ne me résous pas à accepter que 2000 ans après le premier Noël, Marie et Joseph ne trouveraient toujours pas de place dans les hôtels surbookés de Strasbourg et que le bruit des armes se mêle toujours encore aux pleurs du massacre des innocents.

Christian Albecker, président de l'UEPAL

Déclaration : « La fin de vie : convictions et compassion »

Une déclaration sur l'accompagnement de la fin de vie au sein de l'UEPAL, mars 2014

L'accompagnement de la fin de vie est devenu une préoccupation sociétale dans la France d'aujourd'hui à la suite de quelques affaires douloureuses fortement relayées par les medias. Même si certaines situations exceptionnelles appellent d'autres réponses, la loi Leonetti de 2005 permet de résoudre la grande majorité des cas en préconisant le développement des soins palliatifs et l'abandon de l'acharnement thérapeutique. Forte de son engagement dans la société, l'Union des Églises protestantes d'Alsace et de Lorraine (UEPAL) souhaite apporter au débat sur la fin de vie quelques convictions issues d'une réflexion menée en son sein.

Entre les slogans réducteurs « la mort comme je veux » d'une part et « tu ne tueras point » d'autre part, la distance est grande. Dans la Bible, c'est Dieu qui est à l'origine de toute vie et l'être humain est créé libre. Cette liberté peut mener à des choix contradictoires : aller au bout de son chemin, aussi difficile qu'il soit, ou décider de l'écourter.

La condition humaine est marquée par la finitude dont font partie la maladie et la mort ; mais celles-ci ne portent atteinte en aucun cas à la dignité d'une personne, pas plus qu'une perte d'indépendance ou de fonctionnalité. Enfant ou vieillard, bien portant, handicapé ou malade, l'être humain est et reste digne.

Le commandement central de la foi chrétienne « Aime ton prochain comme toi-même » met au cœur de notre vie le devoir de compassion. L'être humain est un être de relation jusqu'au bout de ses jours. Le souci premier est de répondre au désir de vie, de sens, d'affection ; ce que mettent en œuvre les soins palliatifs. Voilà pourquoi l'UEPAL plaide sans réserve pour leur développement. Dans la diversité des circonstances que peut revêtir la fin d'une vie, la vocation des Églises n'est pas de condamner, même lorsqu'il s'agit d'une demande de suicide assisté voire d'euthanasie, dans la mesure où elle témoigne d'abord d'une souffrance ; les Églises se doivent d'accompagner les personnes en fin de vie et leur famille, quelle que soit leur décision.

Les conflits de valeurs sont inévitables, entre espérer guérir et décider de lâcher-prise, entre volonté de Dieu et décision humaine, entre ce qui apparaît comme une ultime solution face à une maladie à l'évolution incontrôlable et ce que dicte la conscience. L'UEPAL affirme, en tension assumée, ses convictions que Dieu est à l'origine de toute vie et que l'homme demeure libre devant Lui. La vie doit être défendue, mais c'est l'amour qui doit guider nos relations à l'autre.

Il n'est pas envisageable de laisser aux soignants et aux médecins, aux familles et encore moins à la personne malade, à chacun isolément, la responsabilité d'un tel choix de vie et de mort. Il incombe à l'Église, en ces moments critiques, d'être à leurs côtés et d'oser avec eux une réponse adaptée. Celle-ci ne pourra qu'être imparfaite, mais elle sera portée par l'espérance que vie et mort sont entre les mains de Dieu.

Contact :
Pasteur Isabelle Gerber, inspecteur ecclésiastique de Bouxwiller
09 67 14 79 32


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